Nous faisons un arrêt au stand à Malargüe, le 28 Juin en fin d’après midi. « Oh, les français ! » nous lance une voix, alors que nous sommes en pleine négociation avec un pompiste. Serge Cornillat en personne nous accoste ! Décidément, le monde est vraiment petit ! Nous savions qu’il était en Amérique du Sud en ce moment, mais rien ne laissait présager que nous nous retrouverions dans l’une des nombreuses stations essence que compte cette pauvre ville perdue dans la Pampa argentine !
A l’écoute de nos projets de trajet, Serge éclate de rire et nous dissuade fermement de continuer plus loin pour aujourd’hui. Apparemment, la route s’avère délicate par la suite. Il nous conseille plutôt de passer la nuit ici (à l’hôtel « Bambi »), et de repartir de bonne heure le lendemain. Serge vit 6 mois de l’année en Amérique du Sud et sillonne depuis 10 ans ce continent qu’il connaît comme sa poche. Nous suivons ses conseils avisés et nous rendons dans le fameux hôtel… où une fois de plus le robinet de la douche me reste dans les mains… Décidément !
Le 29 Juin, nous quittons Malargüe après le lever du soleil pour rejoindre Caviahue, à environ 500 km en direction du Sud. Une vingtaine de kilomètres après Malargüe, la route s’arrête et fait place à une piste de cailloux et de terre criblée de nids de poule. A partir de là, c’est la Pampa à perte de vue. Il n’y a plus personne. Le soleil est notre seul repère (au Nord, puisque nous sommes dans l’hémisphère Sud !) avec les montagnes de la Cordillère des Andes (à l’Ouest). Serge n’avait pas tord, ça va être plus long que ce qu’on pensait… Ce type est encore plus précis qu’un GPS ! Lors de notre discussion d’hier, il nous a recommandé un raccourci : « à 30 bornes de la sortie d’un patelin, nommé Chos Malal (prononcer « Tchose Malale »), vous trouverez une patte d’oie vers la droite, ça vous évitera un détour de 200 km ! ». Très exactement 30 km après ledit village, alors que nous n’y croyons plus trop, l’embranchement annoncé apparaît comme par magie au détour d’un virage. Sidérant ! Ce que Serge n’a pas précisé, c’est que le raccourci en question est là encore similaire à la surface de la Lune : des cailloux glissants, de la terre, de la poussière et des cratères tous les 30 cm…
Après 9 heures de piste, dont seulement 2 heures sur de l’asphalte, nous débarquons éreintés et sous la pluie à Caviahue. La 206 a beau avoir des amortisseurs, les nids de poule étaient tellement énormes que j’ai le nerf sciatique en feu et le coccyx en pièces. Quant à Matth, ce sont ses reins qui sont détruits. Heureusement, nous sommes accueillis par le chaleureux sourire de Ruben Vargas, alias « Caniche » en raison de ses frisettes noires. Cet argentin tient un « refugio » (sorte d’Auberge de jeunesse) avec sa femme Patrizia, où ils reçoivent tous les ans quelques mythes du monde de la glisse. Serge Vitelli* est un habitué des lieux, l’une de ses planches trône même dans la salle de vie, Manu Gaidet** est venu l’hiver dernier, et plein d’autres encore. L’hiver, Caniche emmène les amateurs de grands espaces et de neige vierge faire du ski près du Volcan Copahue, grâce à sa « moto de nieve » mille et une fois retapée.
* Serge Vitelli : Véritable héros du snowboard en France (et dans le monde) ! C’est notamment l’inventeur du « Vitelli Turn », un virage coupé particulièrement esthétique.
** Manu Gaidet : Champion du monde de Freeride à plusieurs reprises, Manu Gaidet est l’un des freerider français les plus audacieux du moment.